Ode en mots tricotés

6 Fév

Il y a un tout petit peu plus d’un an, j’ai commencé à apprendre à tricoter. Mes grands-mères tricotaient, ma mère est une tricoteuse hors pair, mes tantes également, mes belles mère et sœur tricotent, de plus j’ai la chance de travailler avec une collègue très douée, la talentueuse ALLMADEHERE (je vous invite à visiter son site). J’étais donc bien entourée pour débuter. Ce n’était pas ma première tentative, loin de là. Mais cette fois-ci, ça a pris. Un élément a sans doute beaucoup aidé : l’écoute de livres audio. Mon apprentissage du tricot est lié, noué, tissé, emberlificoté dans mes écoutes littéraires.

Je tirais une satisfaction double grâce à la combinaison de l’apprentissage assidu du tricot et de l’écoute en parallèle d’œuvres que je découvrais enfin. D’ordinaire, je suis une lectrice que l’on pourrait qualifier de « lente » : je ne lis pas vite (Moby Dick m’a bien pris 2 ans), je relis souvent la même phrase, je m’endors rapidement en lisant et – pour couronner le tout – je fais partie de ces gens qui ont plusieurs livres entamés en même temps sur leur table de chevet. Il faut savoir être lucide envers soi-même.

Mais tout ça, grâce à l’écoute de livres audio, c’est du passé ! Depuis le début de mon apprentissage, je suis passée d’environ 3 livres papier par an à 20 livres audio et … toujours 3 livres imprimés ! Plus que la performance chiffrée, je resterai marquée à jamais par ces écoutes audio :

  • Les 7 tomes d’À la recherche du temps perdu… 3 fois chacun (Marcel Proust)
  • Le Deuxième Sexe (Simone de Beauvoir)
  • Le comte de Monte-Cristo (Alexandre Dumas)
  • L’éducation sentimentale (Gustave Flaubert)
  • Le portrait de Dorian Gray (Oscar Wilde)
  • Vingt-quatre heures de la vie d’une femme (Stefan Zweig)
  • Le Journal d’un fou (Nicolas Gogol)
  • 1984 (George Orwell)
  • Le consentement (Vanessa Springora)
  • La vocation (Sophie Fontanel)
  • Chavirer et Mercy, Mary, Patty (Lola Lafon)
  • L’événement et Les Années (Annie Ernaux)
  • En cours : Les Frères Karamazov (Fiodor Dostoïevski)

Avec l’écoute de livres audio m’est revenue une vieille habitude, malheureusement endormie depuis quelques années : écrire chaque jour. Je situe le retour de cette manie autour de 1984, il y a quelques semaines de cela.

Un soir, plus que les autres soirs, le tricot, l’écriture, l’écoute de livres audio : tout ça s’est enchevêtré. Chaque nouveau point appris au tricot est devenu l’occasion d’y accrocher des mots, les miens, ou ceux qui émergent des livres en écoute.

Il faut bien le reconnaître : le tricot met dans un état de réception unique en son genre. Une des choses les plus appréciables avec cette activité est d’ailleurs le fait qu’elle permet d’écouter (et même parfois de regarder, d’un œil certes détaché) livres, disques, podcasts, émissions de radio.

À plusieurs reprises déjà, ma mère et moi avons discuté des bienfaits apportés par le tricot. Je n’aurai cependant jamais imaginé à quel point les bénéfices que j’en tirerai seraient importants. Le tricot semble avoir rouvert une porte en moi.

Certains soirs, juste avant que je ne décide qu’il est l’heure d’éteindre et de s’endormir (en général après une heure de tricot), je garde une trace de l’ouvrage en cours et j’y joins les mots qui viennent avec. L’impact de cette micro activité poétique sur mon bien-être est grandissant.

Il y a 3 ou 4 ans, j’étais tombée par hasard sur un petit livre poème qui m’avait alors beaucoup plu : Je, d’un accident ou d’amour de Loïc Demey. Je venais de terminer les Lettres à Lou de Guillaume Apollinaire, ce qui tombait à pic. J’ai commencé à me souvenir que, dès que j’ai su écrire, je me suis mise à écrire des petits poèmes, des petites rimes d’enfant. Ça a duré jusqu’au lycée. Depuis que suis devenue maman, la poésie, grâce notamment à la littérature jeunesse, est revenue, à petits pas de loup, dans ma vie, dans nos vies.

Il y a quatre albums que j’apprécie particulièrement lire, encore aujourd’hui, alors que mon enfant est plus âgé. J’y reviens toujours avec le même plaisir.

  • Tout petit ours de Richard Jones
  • Papou et Pola d’Oili Tanninen
  • Le manteau de mots d’Arnaud Alméras et Vincent Bourgeau
  • Julian est une sirène de Jessica Love

En tricotant, j’ai retrouvé le chemin vers un plaisir que j’avais délaissé depuis trop longtemps, mais qui restait toujours vaguement à la surface : le plaisir des mots.

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